L’efficacité du traité sur le commerce des armes (TCA) dépendra de son contenu et des termes retenus. Les efforts diplomatiques affichés jusqu’à présent dans le processus du traité montrent une multitude d’opinions et d’intérêts divergents. Par nos campagnes et nos actions de persuasion, nous devons donc impérativement mettre en évidence les domaines prioritaires qui permettront de mieux protéger et sauvegarder non seulement des vies humaines mais aussi la dignité humaine. Le TCA doit prévoir des critères explicites en matière de transferts d’armes, de manière à limiter autant que possible toute interprétation du texte par les États signataires.
Intégrer les principes des droits humains et le droit international humanitaire;
Inclure dans son champ d’application les armes légères et de petit calibre, les munitions et les pièces de rechange;
Tenir compte des répercussions négatives des armes illicites sur le développement économique et social à long terme;
Inclure un texte fort et efficace sur les effets néfastes des armes illicites sur la violence sexospécifique;
Inclure des dispositions concernant l’aide aux survivants.
Une étude menée par le Comité international de la Croix-Rouge, mandatée par les États en 1995 et publiée en 1999, arrive à la conclusion que la prolifération des armes contribue aux violations du droit international humanitaire et qu’elle a des conséquences néfastes sur les civils durant les conflits armés.
Tant qu’on pourra se procurer des armes facilement, le droit international humanitaire sera l’objet de violations graves et les interventions humanitaires seront menacées.
Toutes les conventions existantes en matière de droits de la personne, y compris la Charte des Nations Unies, doivent être mentionnées de manière explicite dans le traité sur le commerce des armes puisqu’elles justifient la nécessité et la légitimité d’une réglementation universelle en matière d’armes qui soit rigoureuse et efficace
C’est pourquoi le TCA doit refléter l’obligation faite à tous les États de veiller au respect du droit international humanitaire et des principes des droits humains, en les portant au rang de critères fondamentaux permettant de prendre des décisions avisées sur le transfert d’armes, l’objectif étant que les armes ne se retrouvent pas entre les mains de personnes ou de groupes susceptibles de les utiliser en commettant des violations graves des normes et des critères convenus.
Le traité sur le commerce des armes doit porter sur toutes les armes conventionnelles. L’inclusion des armes légères et de petit calibre est essentielle pour qu’un traité puisse répondre aux besoins de celles et ceux qui sont les plus affectés par les conflits armés.
La majorité des armes qui traversent les frontières sont des armes légères et de petit calibre. Pour citer un homme venant d’Afrique de l’Ouest: «Du Mozambique au Monténégro, de la Colombie au Kenya, les armes légères et de petit calibre sont devenues des armes de destruction massive.» Les petites armes et les munitions sont utilisées comme des outils de guerre, elles sont utilisés pour la sécurité, le crime, la coercition, la protection et pour instiller la peur et maintenir la paix et l’ordre public. Réglementer le commerce des armes de petit calibre et des munitions, c’est veiller à ce qu’elles soient utilisées au service de la justice et NON PAS pour semer la terreur.
Les effets dévastateurs des conflits, de la criminalité armée et de toutes les formes de violence armée partout dans le monde sont manifestes et s’étalent au grand jour. La violence armée entraîne la fermeture d’écoles et d’églises, divise les gens, sature les systèmes de santé et n’encourage certainement pas l’investissement ni la productivité économique, ce qui fait peser une incertitude sur la vie et les moyens de subsistance des populations concernées.
La menace directe et les risques physiques de l’utilisation des armes entraînent des déplacements de populations, des blessures et même la mort, sans oublier que les dépenses en armes et la course aux armements viennent grever d’autres budgets, tels que ceux qui devraient être réservés à l’éducation et à la santé. Lorsque les dépenses en armement ne sont pas soumises à des critères de responsabilité et de transparence, elles risquent d’aggraver la corruption et d’encourager les violations des droits de la personne. Selon le Rapport de la Banque mondiale sur le développement dans le monde, aucun pays subissant un conflit armé n’arrivera à atteindre un seul des objectifs du Millénaire pour le développement.
Les femmes sont touchées de manière disproportionnée par l’usage des armes et cela se traduit principalement par la violence sexuelle et le viol. Les résolutions 1325, 1820, 1888, et 1960 du Conseil de sécurité des Nations Unies qualifient la violence sexospécifique d’arme et de tactique de guerre. Dans son rapport sur les résolutions 1820/1888 de décembre 2010, le secrétaire général de l’ONU souligne que «La violence sexuelle comme arme de guerre peut devenir un mode de vie qui, une fois enraciné dans le tissu de la société civile, persiste longtemps après que les armes se sont tues.»
Le commerce irresponsable des armes d’un pays à l’autre a manifestement des conséquences durables sur la vie des femmes, des enfants et des familles. Le TCA a la possibilité et la responsabilité de donner un nom à cette réalité et de mettre en place des mécanismes au sein des politiques commerciales pour répondre directement aux besoins des femmes.
Le besoin de prêter assistance aux victimes de transferts d’armes illicites et irresponsables constituera un élément fondamental du succès du traité sur le commerce des armes.
Les fabricants, les entreprises, les agents et les gouvernements qui font le commerce des armes doivent rendre des comptes sur leurs activités commerciales et être tenus responsables de l’usage illicite des armes s’ils ne s’y soustraient pas. Il convient notamment de consigner méticuleusement tout ce qui permet de suivre la trace des armes et des munitions, ainsi que le but de la vente et des transferts. De plus, il est nécessaire de tenir compte des besoins spécifiques des groupes vulnérables.
L’assistance aux victimes et aux survivants n’a pas besoin d’être un système de dédommagements ou de paiements directs; cependant, l’accès aux soins médicaux, la réintégration et le soutien psychologique, les programmes sociaux et économiques permettront de les aider et d’accélérer le processus de reconstruction et de consolidation de la paix après un conflit.